Traqué dans l’espace

Chronique BD Traqué dans l’espace, publiée en Novembre 2025

 
Sur la planète désertique Foran 4, un gondaris va découvrir sous la glace une capsule de sauvetage enterrée avec un être vivant dedans. Après les analyses d’un autre gondaris, scientifique de son état, il s’avère que le personnage en hibernation est un être très spécial. C’est un être humain et pas n’importe lequel : le dernier humain de l’univers…
 
Traqué dans l’espace, ou « Space Captain » de son titre original, est un comics made in England paru en 6 épisodes de 2014 à 2019. Il n’a été traduit en français que 10 ans plus tard pour la collection « Aventuriers d’Ailleurs » des éditions Bamboo. Même s’il m’arrive de lire des Comics, je donne rarement mon avis sur ceux-ci dans les pages de ce site. Ma première chronique de ce type d’ouvrage date de 2015 et il s’agissait de Savage d’un certain Charlie Adlard et Pat Mills, deux britanniques comme Chris Baldie et Mickael Park les co-auteurs de ce comics. C’est en voyant la couverture sobre et épurée, lors de mon passage à la librairie éphémère du festival des Utopiales de cette année, que j’ai d’abord été attiré par cet album. Puis ma curiosité a été attisée par la lecture des premières pages sur le site de sceneario.com
 
 

 
 
Ce n’est pas tant le dessin que l’originalité du scénario et les multiples rebondissements qui tiennent en haleine le lecteur pendant un peu plus de 240 pages. Ce scénario, on le doit à deux hommes qui ont tous les deux apporté leur « pierre à l’édifice » dans la construction et l’écriture de l’histoire. Comme Chris Baldie est aussi au dessinateur de l’œuvre, qui utilise la science du découpage pour donner du dynamisme au récit. On ne s’ennuie pas une minute dans cette aventure galactique menée d’une main de maître par ces deux auteurs écossais, encore peu connus en France. Cet album reprend avec intelligence les codes des bons vieux Space Opéra, pour proposer une vision du futur où l’homme est en voie de disparition, au profit de nombreuses espèces extra-terrestres. Les Star Wars et les Star Trek sont bien évidemment des références auxquelles on pense en lisant la BD mais on y trouve aussi d’autres références comme 2001, l’odyssée de l’espace, avec le nom de HAL l’ordinateur de bord d’un vaisseau spatial. D’autres références, cette fois-ci liées aux western, émaillent cette histoire d’aventure épique. Ces références au cinéma sont appuyées par un découpage des cases en plan quasi cinématographiques.
 
Mis à part quelques rares protagonistes comme par exemple Kathy, la femme du Capitaine de l’espace, la plupart des personnages ne sont pas désignés par un nom ou un prénom mais plutôt par leur rôle dans l’aventure (le doc, le général, la traqueuse…). Cela n’empêche pas de s’attacher à eux et de les trouver sympathiques pour la plupart. Même les antagonistes ne sont pas totalement antipathiques et on comprend très vite qui est qui, même sans patronyme. Parti pris de cette BD, tout ce petit monde partage le même langage avec une ressemblance physique assez proche des êtres humains.
 
 

 
 
En considérant que l’être humain est une marchandise que l’on doit chasser comme un animal, cette histoire originale est centrée sur l’humanité et la survie de l’espèce. Mais ne vous y trompez pas ce n’est pas forcément une bande dessinée trop « cérébrale ». Ce qui ne l’empêche pas de traiter de sujets très sérieux comme la solitude, le sens à donner à la vie quand on est le dernier de son espèce ou encore les regrets ou l’amitié. C’est un savant mélange d’action, d’humour et d’émotion qui rendent cette œuvre assez captivante et pleine de rebondissements. De l’aveu même de ses 2 créateurs, c’est une volonté de leur part de rendre leur récit galactique, divertissant avant tout.
 
Le coup de crayon expressif de Chris Baldie n’est pas toujours esthétique à proprement parler mais il est graphiquement intéressant. Le dessin semi-réaliste, style comics « indé », colle parfaitement à la narration. Le découpage des cases et les couleurs chatoyantes concourent à donner du rythme tout en donnant un aspect attractif aux planches. En dessinant ses héros façon « cartoon », l’auteur crée de la proximité avec le lecteur en lui permettant de s’attacher aux personnages. On découvre aussi un récit agrémenté de flash-backs compréhensibles qui ajoutent de la cohérence à l’ensemble. Planètes, vaisseaux spatiaux et extra-terrestres rendent crédibles l’univers graphique futuriste construit par l’auteur.
 
 

 
 
Une histoire rondement menée qui se déploie sur 6 chapitres, avec une efficacité implacable. De la SF comme on l’aime.